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Mardi 9 novembre 2021 : l’Association Femmes Débat & Société recevait Annick Billon.

Rien d’étonnant à ce que l’Association Femmes Débat Société accueille la Sénatrice de Vendée : Annick BILLON dans le cadre de ses déjeuners mensuels. L’Association et la Sénatrice partagent, en effet, une même préoccupation : la parité entre les hommes et les femmes dans tous les domaines.

En souhaitant la bienvenue à son invitée, la Présidente de FDS, Monique RONZEAU, souligne la place importante qu’occupe le thème de la parité dans l’actualité sociale. Annick BILLON joue dans ce domaine un rôle important puisqu’entre autres activités, elle est au Sénat membre de la commission de la culture, de la communication et de l’éducation, Présidente de la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes. Si l’on constate aujourd’hui une augmentation de l’inégalité entre hommes et femmes, on constate aussi que cette inégalité est très disparate suivant les secteurs d’activité et les lieux de vie. On ne trouve nulle part mention de la parité hommes-femmes dans la récente réforme de la Haute Fonction Publique, mais elle est devenue obligatoire dans les organismes publics. Elle progresse également dans les grandes agglomérations à défaut d’y parvenir dans les zones rurales. Femmes Débat Société soutient évidemment le développement de tous les dispositifs permettant de progresser vers la parité.

Tout en signalant qu’elle n’a pas eu personnellement à souffrir dans sa carrière de l’inégalité hommes-femmes, Annick BILLON indique que les droits des femmes ont reculé avec l’arrivée de la pandémie. Dix ans après l’adoption de la loi Coppé-Zimmermann, le chemin vers une parité réelle est encore long. En milieu rural, la situation est très différente : l’accès à la formation, à l’orientation, à une gynécologie médicale, à une prévention, l’obtention du permis de conduire, par exemple, y sont beaucoup plus difficiles qu’en milieu urbain. Alors que 11 millions de femmes en France vivent en milieu rural, on constate l’absence de gynécologie médicale dans 13 des départements du pays.

La ruralité amplifie les problèmes. C’est là qu’on constate le plus souvent les abus les plus graves : viols, prostitution organisée. C’est là que se produisent 50% des féminicides, que les femmes sont le plus facilement enfermées dans des stéréotypes. Elles souffrent de sujétion économique : difficile de trouver un travail à proximité, une formation universitaire à une distance accessible. La mobilité se trouve souvent au centre du problème. Et quid des familles monoparentales : comment concilier le soin des enfants avec une occupation professionnelle ? La loi Coppé Zimmermann s’applique mieux aux instances dirigeantes qu’aux communautés rurales. En tant qu’élue locale, Annick BILLON est particulièrement qualifiée pour saisir ces enjeux.

La loi vient d’accorder aux pères un congé de paternité de 11 jours. C’est un progrès qui ne suffit pas à restaurer l’égalité. Par ailleurs, que dire de l’inégalité salariale entre hommes et femmes ? Certes, il y a des explications à cette situation : 90% des activités à temps partiel sont confiées à des femmes, mais ces activités partielles sont-elles choisies ou subies ?

C’est très tôt que l’inégalité hommes femmes s’insinue dans les mentalités et l’école y contribue : ne se contente-t-elle pas le plus souvent d’orienter les filles vers des filières littéraires au détriment des filières scientifiques réputées plus « masculines » ? Ne les écarte-t-elle pas de certains sports réputés « virils », le rugby par exemple ? C’est donc insidieusement et très tôt chez les jeunes que l’idéologie sexiste pénètre la société.

S’il est essentiel de voter des lois pour faire place aux femmes, c’est à leur application grâce à des indicateurs de suivi qu’il faut aussi veiller.
Monique RONZEAU remercie chaleureusement son invitée qui a su faire partager sa compétence et son expérience sous forme d’échanges particulièrement vivants et concrets.

Mardi 22 juin 2021 : l’Association Femmes Débat & Société recevait Alain Duhamel.

La Présidente de FDS, Monique RONZEAU, se montre très heureuse de retrouver les membres de l’Association à l’issue des périodes de confinement. Elle évoque les nombreux projets en préparation : poursuite des travaux sur la parité après le séminaire très réussi du 13 avril dernier, rencontre avec des femmes coréennes, dont l’organisation est prévue le 4 octobre prochain au Centre Culturel Coréen, etc…

Françoise VILAIN, Présidente d’honneur, accueille à son tour l’orateur Alain DUHAMEL, qui vient de publier « Emmanuel le Hardi » aux éditions de l’Observatoire. Inutile de présenter l’écrivain, qui est déjà venu nous rencontrer et dont les chroniques, actuellement sur BFM, sont depuis longtemps aussi connues qu’appréciées.

Alain DUHAMEL ne se contente pas de commenter son ouvrage : il évoque aussi l’actualité enrichie par les élections départementales et régionales en cours.

Pourquoi le choix d’un sobriquet dans le titre de l’ouvrage et pourquoi ce choix-là plutôt qu’un autre ? Parce que pratiquement tous les souverains ont eu un sobriquet au cours de l’Histoire de France et parce que la hardiesse sous-entend une prise de risques accompagnée de chances de gagner comme de rebondir en cas d’échec. La témérité, elle, s’accompagne d’une plus grande inconscience.

Elu sans parti, ni passé, ni image, Emmanuel le Hardi n’a jamais été un chef de parti. C’est un « bonapartiste » dont l’audace peut se comparer avec celle du Premier Consul. Il a conquis le pouvoir dans la rupture en mettant fin aux règles de la 5ème République. Ce pouvoir, il l’a personnalisé avec des techniques de communication différentes des techniques habituelles. Enfin, il fait preuve d’une volonté d’anticipation, d’une prise de responsabilités, d’un esprit de décision qui cassent les codes. Il n’hésite pas à déclarer l’Europe à reconstruire, l’OTAN en état de mort cérébrale et on en parle à l’étranger.

Il en va de même en politique économique. C’est un keynésien libéral qui a permis à la France de présenter des chiffres positifs fin 2019 début 2020, autrement dit avant la crise du Covid.

Face à la crise sanitaire, il a tâtonné, peinant à établir des rapports soutenus entre l’Etat central et les communautés locales. Toutefois, la protection individuelle des Français a été forte, ambitieuse et toutes les prévisions pour l’an prochain indiquent un taux de croissance supérieur à celui de l’Union Européenne.

En somme, le Hardi prend en main les choses et affiche ses choix. Par contre, que de maladresses en politique : des phrases sacrificielles pour un chef d’Etat prononcées à quinze reprises ! Et puis, de mauvais rapports avec les corps intermédiaires : là où Chirac s’entendait avec Force Ouvrière, Sarkozy avec la CGT et Giscard avec la CFDT, le Président MACRON ne trouve de terrain d’entente ni avec les syndicats, ni avec le MEDEF, ni avec les élus des métropoles. C’est avec ceux des petites villes que le courant passe le mieux.

Populaire, il a séduit au début de son mandat, avant d’être rejeté par 50% des Français qui ont déclaré avoir très mauvaise opinion de lui. Cette situation s’est améliorée aujourd’hui avec 25% seulement de mécontents.

Mais surprise devant le niveau de l’abstention aux élections régionales et départementales en cours ! Il faut remonter aux cantonales de 1791 et 1799 pour trouver un degré d’abstention comparable. Les explications abondent : la sortie du confinement, une météo favorable attirant les électeurs au grand air, l’absence d’une campagne explicite et l’inconscience de l’importance de ces scrutins locaux démotivent les électeurs.

Les conséquences sont importantes : la probabilité d’un duel Macron – Le Pen à la Présidentielle s’atténue. S’agit-il d’un phénomène conjoncturel ? 75% de l’électorat RN a négligé les isoloirs alors qu’aux présidentielles, 95% de ses partisans vient voter. A 10 mois des présidentielles, les pôles vont-ils s’effondrer ?

Alain DUHAMEL complète son exposé en répondant aux nombreuses questions qui lui sont posées. L’essentiel des échanges peut se résumer ainsi :

 

  • On parle beaucoup de la « colère » des Français : or, elle ne s’est pas vraiment exprimée dans les urnes. Pour lui, ce sentiment de colère n’est pas actuellement dominant. Ce que veulent les Français, c’est un climat serein qui leur fasse vivre une période agréable. Pour eux, actuellement, mieux vaut pacifier que dramatiser.
  • Assistons-nous à l’émergence d’une droite et d’une gauche ? La France s’est crue duale avec d’une part une gauche, d’autre part une droite dont l’identité a été brouillée par le Front National. Or, le pouvoir s’est depuis longtemps, même sous la IIIème et la IVème République, exercé au centre, centre-gauche ou centre-droit. Historiquement et localement, la droite est la première force politique du pays et la gauche est seconde. Les conseils généraux sont peuplés de divers droites et de divers gauches. Actuellement, le RN continue à peser et restera fort. En même temps, la droite a repris conscience de son existence. Sa base électorale existe et son candidat va surgir soit au moyen d’une primaire, soit de façon naturelle. La question est de savoir s’il y aura un ou deux candidats.
  • A-t-on été trop loin dans le non-cumul des mandats ? Il vaut probablement mieux cumuler un mandat national avec un mandat local, mais sans chercher à multiplier d’autres présidences.
  • Il faut se souvenir qu’en politique, les rapports sont violents. Il faut aussi différencier le candidat et le vainqueur de l’élection. Le candidat caricature l’adversaire car en campagne, on est outrancier contre les autres, ce qui se retourne contre soi-même une fois qu’on est élu.
  • Trouve-t-on encore des partis fondés sur des valeurs fortes ? Les plus populaires sont les moins agressifs. Les Français aiment la tolérance et le respect des adversaires : ce sont des perdants magnifiques. Les formations politiques ne sont pas mortes. Elles sont néanmoins concurrencées par le développement des nouveaux moyens de communication qui facilitent les échanges directs entre citoyens
  • La faiblesse de la participation des jeunes aux élections en cours est préoccupante : 75 à 80% d’abstentionnistes chez les 25 – 35 ans.

Alain DUHAMEL conclut en soulignant qu’en politique, on doit mobiliser une part d’espérance qui ne se laisse pas décomposer au bout de 6 mois.

La Présidente Monique RONZEAU remercie chaleureusement son invité pour la pertinence de ses propos et pour sa disponibilité.

 

 

Le mardi 11 février 2020, Femmes Débat Société accueillait Jean-Pierre RAFFARIN lors de son déjeuner mensuel.

Difficile de résumer l’intervention de Jean-Pierre RAFFARIN devant les membres de FDS à l’occasion de la sortie de son livre : Chine, le Grand paradoxe : sa maîtrise impressionnante du sujet et sa riche expérience personnelle en font un connaisseur unanimement reconnu de la Chine. FDS se félicite d’avoir pu bénéficier de ses analyses et le remercie de nous avoir fait partager son expertise avec une grande générosité sans ménager son temps ni éluder les nombreuses questions.

La présidente de FDS, Monique RONZEAU, après l’avoir accueilli, rappelle en préambule que Jean-Pierre RAFFARIN a été l’un des parrains-fondateurs, il y aura bientôt vingt ans, de Femmes, Débat & Société. L’objectif était alors de mobiliser les femmes de droite et du centre au service du débat public et des grands enjeux sociétaux. Pari tenu !!!

Inutile de présenter l’orateur : sa notoriété nationale (il a été l’un des premiers ministres de Jacques CHIRAC de 2002 à 2005) et sa proximité avec FDS suffisent à le situer. Toujours soucieux de promouvoir des femmes aux postes de responsabilité, il suggère de substituer l’alternance à la parité : par exemple, à une majorité d’hommes dans les instances dirigeantes pourraient succéder une majorité de femmes et inversement ensuite.

En France, on connaît mal la Chine, pays très contrasté où règne l’association des contraires : c’est le plus grand pollueur du monde en même temps que le champion de la lutte anti-pollution. C’est aussi un pays très centralisé : le parti communiste compte 90 millions de membres, plus que de français vivant sur cette terre….

Pourquoi Jean-Pierre RAFFARIN a-t-il écrit « ce » livre ? D’une génération nourrie à la connaissance et à l’influence de l’Amérique (à cette époque paraît l’ouvrage de Jean-Jacques SERVAN-SCHREIBER : Le Défi Américain), il souligne la nécessité aujourd’hui de préparer, notamment les jeunes, à relever un autre défi : la Chine est la plus grande nation du monde, mais nos derniers présidents de la République n’y étaient jamais allés avant leur élection…. Elle est assise sur 5000 ans d’histoire, mais celle-ci n’est pas connue dans nos pays européens. Alors que chez nous, en France, le révolté, le rebelle jouit d’une aura romantique, en Chine, c’est un coupable, coupable d’atteinte à une valeur chinoise essentielle : l’Unité. Chez nous, on raisonne comme un moteur à trois temps : thèse, anti-thèse et synthèse. La Chine se contente d’un moteur à deux temps : thèse et anti-thèse. Pour nous, le temps est linéaire ; on part de zéro pour aboutir à une culture de création. En Chine, on se transforme, on s’adapte : il n’y a pas de point zéro. Un contrat signé la veille peut se dénoncer le lendemain.

La Chine va devenir une puissance considérable et sera fréquentée par des jeunes. Elle sera la première économie du monde en 2050. Avec l’avènement de XI JIN PING, on a cru à son évolution vers une société libérale, ce qui s’est avéré erroné, le Parti communiste gardant une main ferme sur la société. Aujourd’hui, tout s’y accélère : à population sensiblement égale, la ville de Châtellerault avait noué des liens avec celle de Shenzen. Quelques années après, celle de Shenzen s’évaluait à 8 chiffres tandis que celle de Châtellerault se contentait de doubler ou tripler.
La Chine est-elle une puissance agressive ? Non ! Comme tout pays, la Chine roule pour elle-même, mais elle n’a jamais fait la guerre hors de chez elle, alors que l’histoire montre que les européens l’ont fait à de nombreuses reprises (exemple de la guerre de l’opium). La Chine cherche à se développer à son rythme et à développer une classe moyenne. Au tout début de ce siècle, la Chine a réalisé qu’elle allait devenir la première nation du monde, mais elle a adopté une stratégie de discrétion. Puis en 2008, elle a décidé d’assumer sa position et ce furent l’Exposition Universelle, les Jeux Olympiques. Elle a cherché un leader susceptible d’incarner la puissance chinoise au niveau mondial avec XI JIN PING et a développé de grands projets, telle la route de la soie. Elle participe maintenant à la gouvernance du monde.

Devant ce réveil, le monde a eu peur. Avec l’arrivée de D.TRUMP et alors que beaucoup de chinois ont de la sympathie pour les USA, le nouveau président instaure une tension avec la Chine qui sera longue et durable. L’Amérique a peur de la Chine et la Chine veut prendre la place de l’Amérique, ce qui engendre une relation nécessairement conflictuelle, mais l’Amérique a aussi conscience des risques économiques encourus, notamment en Bourse. Si guerre il doit y avoir, ce sera probablement sur l’indépendance de Taïwan.

Quelle place pour l’Europe dans ce contexte ? Clairement sous pression américaine, comme en témoigne l’affaire Hua Wei : désireuses d’utiliser la 5 G, les entreprises européennes s’en voient dissuadées par les Etats-Unis. De même, ils ont encouragé le Brexit, pénalisé les échanges européens avec l’Iran, etc … Au final, faute d’une stratégie commune, l’Europe risque de n’être qu’une balle de ping-pong à la merci des ambitions des Etats-Unis et de la Chine, stratégie commune à construire grâce à une collaboration franco-allemande. Or, l’Allemagne qui n’approuve guère notre gestion économique, est elle-même plombée par sa crise automobile, son recours à l’énergie du charbon et ses problèmes migratoires. Sur le plan de la sécurité, la France ne peut plus compter uniquement sur les américains : il lui faut se rapprocher de l’Allemagne, de la Russie et de la Chine…. L’urgence : préparer nos jeunes esprits à l’état du monde, à comprendre l’Asie.

En réponse aux nombreuses questions de l’assistance, Jean-Pierre RAFFARIN souligne les points suivants :

  • la pénétration chinoise en Afrique suscite des inquiétudes. Elle ne respecte ni les règles de l’OCDE ni les lois des Etats, d’où une concurrence inégale. Mais ce sont les Etats-Unis qui refusent d’admettre la Chine dans l’OCDE. Notre organisation est liée de près aux Etats-Unis, alors que nous aurions intérêt à traiter les américains comme les chinois.
  • on attribue souvent la position des Etats-Unis à l’élection de D.TRUMP. En réalité, tout a commencé avec B.OBAMA, l’actuel président n’a fait qu’accélérer l’évolution. Nous-mêmes européens, avons mis V. POUTINE dans les bras des chinois à la suite des tensions apparues dans les pays baltes et dans les pays de l’Est. Un exemple ? Vient d’être distribué en Suède un livret indiquant quoi faire en cas de guerre avec la Russie …Il est urgent que la diplomatie européenne – franco-allemande en particulier - ouvre le dialogue avec la puissante diplomatie russe.
  • la démographie africaine explose : d’ici 2040, un milliard de jeunes africains seront à intégrer. La France, à elle seule, n’en a pas les moyens. Il faut qu’elle établisse un dialogue avec les pays africains concernés et avec les chinois qui, en Afrique, ont besoin de partenaires.
  • en Iran, l’Europe a jusqu’à maintenant encouragé la modernisation. Elle cherche aujourd’hui un accord de désarmement et elle a besoin de la Chine, qui est le premier partenaire commercial de l’Iran, pour l’y aider.
  • la Chine est un pays où règle une totale sécurité, au moyen entre autres de la reconnaissance faciale. En France, il n’en va pas de même: c’est plutôt le règne du « pas vu, pas pris ». Le vrai problème est ce que la Chine va faire de ces données. Il faut se souvenir qu’en Chine le groupe l’emporte toujours sur l’individu.
  • sur le plan démographique, la Chine est sortie de la politique de l’enfant unique. On peut raisonnablement penser que l’Inde et l’Afrique vont parvenir à maîtriser leur démographie. C’est aux pays eux-mêmes qu’il revient de le faire, car les peurs qui envahissent les pays d’immigration ne règlent rien.
  • en matière d’éducation, les exigences asiatiques sont très fortes. Un enfant coréen peut devoir travailler une quinzaine d’heures par jour. Les plus jeunes sont soumis à des pressions analogues à celles qui règnent au sein de nos « prépas ». Ces populations développent une grande puissance de travail.

C’est à Françoise VILAIN, Présidente d’Honneur de l’Association, qu’est revenue la mission de remercier l’orateur pour avoir partagé son incomparable expérience d’un pays qui reste trop méconnu en France. Comment ne pas inciter nos jeunes à se familiariser d’urgence avec la Chine : acteur majeur du monde de demain ?

Le mardi 12 novembre 2019, Femmes Débat Société accueillait Caroline ROUX lors de son déjeuner mensuel.

Au préalable, la Présidente de l’Association, Monique RONZEAU rappelle brièvement le programme des rencontres à venir : un déjeuner le mardi 10 décembre avec Jean-Pierre RAFFARIN à l’occasion de la sortie de son livre : « Chine- le Grand Paradoxe ». En janvier, un dîner au Cercle Universitaire Mabillon permettra aux membres de l’Association de se retrouver pour un temps d’échanges.

Monique RONZEAU accueille ensuite Caroline ROUX et la remercie de sa présence. Elle lui présente en quelques mots l’Association qui rassemble des femmes de tous horizons autour de projets concrets et de partenariats tel celui avec les femmes tunisiennes intégrées dans l’Association Tunisiennes Fières. Femmes Débat Société a pour objectifs de développer un regard féminin sur les grands sujets de société ainsi que la participation des femmes dans le domaine politique et leur promotion au sein des entreprises et de l’administration.

Françoise VILAIN, Présidente d’Honneur de l’Association, souhaite la bienvenue à l’invitée avant de rappeler quelques étapes de son cursus : un diplôme de Sciences Po Lyon puis d’une école de journalisme avant de mener une carrière de journalisme radiophonique à Europe 1, ensuite télévisuel qui lui apporte aujourd’hui la célébrité avec l’animation de C dans l’air.

Outre le rappel de ces performances, Françoise VILAIIN insiste sur la personnalité de Caroline ROUX. C’est une femme complète qui a quatre enfants tout en étant une grande professionnelle. Elle a un charme sobre qui lui permet de faire ressortir ce que ses interlocuteurs ont de meilleur. Incisive, elle traite ses sujets avec profondeur et originalité.

Elle éclaircit ce qui est compliqué et, par ailleurs, veille à rendre effectif le principe de parité sur ses plateaux en y invitant systématiquement des femmes parmi les personnalités sollicitées.

Caroline ROUX prend à son tour la parole en évoquant tout d’abord son organisation personnelle et son rythme quotidien, rythme soutenu de façon rigoureuse puisqu’il débute à 5heures du matin avant de rejoindre France 2 pour l’émission de 7 h 28 et de préparer celle de C dans l’air en choisissant avec deux rédacteurs en chef le sujet du jour et avec six programmatrices les expert(e)s qui interviendront. La journée est ponctuée par de l’exercice physique, une brève sieste et une séance de maquillage avant d’animer l’émission. Rendue à sa vie privée à 19h, elle veille à réserver trois jours de suite à sa vie familiale à partir du jeudi soir.

Dans le monde des médias, les exigences sont particulièrement fortes envers les femmes car le code de crédibilité est d’abord masculin. Caroline ROUX a tenu à le féminiser au risque de susciter l’opposition de certains de ses collaborateurs ou collaboratrices. C’est ainsi, par exemple, qu’elle a sollicité une femme spécialiste du terrorisme. Il lui a fallu affronter, outre la résistance des collaborateurs, les réticences des expertes qui, au départ, hésitent à sortir de leur spécialité. Caroline ROUX a dû les encourager et elle continue à veiller à ce que les autres invités ne leur coupent pas la parole. Le combat est en train d’être gagné avec aujourd’hui une proportion de 40,8% de femmes à l’antenne.

Ce combat, elle l’a personnellement vécu lorsqu’elle est arrivée à 26 ans chez Europe 1 Elle a réussi à intégrer le service politique avec Alba Ventura. Au départ, elle s’est imposée sur un mode brutal, raide, au besoin désagréable et agressif, avant d’atténuer son comportement lorsqu’elle était à Canal + tout en restant intransigeante sur le fond. Elle est parvenue à gagner sa crédibilité en restant femme sans chercher à copier un modèle masculin. Ce fut au prix d’un petit combat quotidien. C’est ainsi qu’en annonçant un jour sa prochaine maternité à son patron, elle s’est attirée cette remarque : « Alors, vous ne serez plus journaliste ».

Interrogée sur les valeurs qu’elle privilégie, elle répond que comptent essentiellement pour elle sa famille, le bonheur dans le cocon familial. Mais cette option ne va pas sans un certain sentiment de solitude au plan professionnel qu’elle compte surmonter en favorisant l’émergence des femmes.

Lors des questions avec la salle, Caroline ROUX constate que l’information en continu ne favorise guère la réflexion. La course à l’audience encourage la violence des débats, la lutte voire l’insulte. Il faut « parler gras », caricaturer les opposants pour que les journalistes puissent en parler. Face à de telles situations, Caroline ROUX enjoint à ses invités de « parler un ton en-dessous » : elle est convaincue qu’on peut avoir une parole vraie, apaisée si l’on connaît bien ses dossiers et si l’on garde le cap. Il reste que les politiques arrivent souvent avec des idées préconçues et refusent d’en changer ou d’aborder d’autres sujets que ceux qu’ils défendent.

Elle choisit les sujets qu’elle aborde en fonction de leur problématique. Elle écarte ce qui divise et privilégie ceux sur lesquels on a de quoi parler. En ce qui concerne les intervenants, elle sélectionne ceux qui sont complémentaires et qui s’écoutent mutuellement. C’est ce qui valorise la parole.

A ses yeux, le journalisme est malheureusement un secteur quelque peu sinistré et qui n’est pas porteur d’avenir. Interrogée sur ses convictions, elle fait part de ses inquiétudes en constatant la fin du multilatéralisme. On est en train de détricoter ce qui a fait consensus après la guerre. Il n’y a qu’à regarder la brutalité qui bouillonne sous les réactions turques, chinoises et dans les pays

émergents ou face au problème kurde. Les peuples se soulèvent avec violence face à des institutions fragiles. De cette fragilité témoignent le projet britannique de changement de constitution, la dette des USA qui atteint 2 300 milliards de dollars, l’endettement des particuliers et des entreprises, le système financier avec les fonds de pension, l’économie souterraine …. Quand la richesse ne crée pas de valeur, s’esquisse la fracture du système capitaliste avec son cortège de risques : repli identitaire, retour des nationalismes.

La Présidente Monique RONZEAU remercie chaleureusement Caroline ROUX dont l’entretien se termine sous des applaudissements nourris.

Dans le cadre de ses déjeuners mensuels, l’Association Femmes Débat Société a accueilli la journaliste et femme de lettres Irène FRAIN le mardi 10 septembre 2019.

Monique RONZEAU, Présidente de l’Association, évoque rapidement les projets de l’Association tels que prévus par le Conseil d’administration : les invitations concernent Olivier FARON, Administrateur Général du CNAM qui publie un ouvrage : FORMER, dont le thème principal a trait à son expérience dans le domaine de la formation professionnelle acquise auprès de publics extrêmement variés, Alexia GERMONT sur les enjeux européens. L’Association s’intéressera aussi au partenariat avec la Chine et poursuivra, bien sûr, sa collaboration avec Tunisiennes Fières, dont la Présidente Donia KAOUACH fait partie du Conseil d’Administration de Femmes Débat Société.

Monique RONZEAU accueille ensuite Irène FRAIN, journaliste et écrivain à l’occasion de la sortie en librairie, prévue le 19 octobre, de son ouvrage : Je te suivrai en Sibérie, Editions Paulsen. Elle lui présente l’Association Femmes Débat Société comme un club de réflexion et de contacts entre des femmes aux profils très différents et qui partagent les mêmes valeurs de démocratie, d’humanisme, de libéralisme, de développement durable et de construction européenne. Plus encore, ce club entretient des relations d’amitié, de solidarité et de soutien entre ses membres.

La parole revient ensuite à Irène FRAIN qui se définit comme une femme de curiosité, convaincue que ce qui a été laisse des traces, traces qui contribuent à forger notre identité. C’est à partir d’un texte datant de 1861 et publié en Union Soviétique en 1975, qu’Irène FRAIN conçoit son ouvrage. Ce texte évoque l’exil des principaux auteurs de la Révolution Décembriste fomentée en 1825 par un groupe de grands aristocrates russes contre le pouvoir absolu du tsar Nicolas 1 er . Il a été dicté par une Française, nommée Pauline, à la fille qu’elle avait eue de sa liaison avec un des révolutionnaires. Ce texte s’arrête brusquement et Irène FRAIN, frustrée par cette interruption, a entrepris d’aller en Sibérie éclairer les circonstances et la suite de cette histoire, histoire passionnante et tout à fait inattendue.

Une Française, née à Saint Mihiel dans la Meuse, était marchande de mode avant d’émigrer en Russie pour y exercer son métier. Séduite par un aristocrate russe décembriste, elle en a une fille et accompagne son amant dans son exil en Sibérie, à l’image d’un certain nombre d’épouses des déportés. Là, fidèles à leurs idéaux, ces bagnards établissent une république démocratique à la Française, inspirée des principes de l’esprit des Lumières, tel qu’apparu en France au XVIIIème. Dans cette République, on chantait la Marseillaise.

Irène FRAIN a mis ses pas dans les leurs non sans se poser beaucoup de questions : comment ces femmes issues de la plus haute aristocratie russe ont-elles pu laisser leurs enfants derrière elles pour aller vivre en Sibérie, comment ont-elles eu le courage de sauver leurs époux ? Etait-ce par amour, par devoir, par goût du sacrifice ? Au sein de cette collectivité, on parle français et Pauline, qui a épousé son amant, enseigne la cuisine tout en se trouvant 17 fois enceinte. Chacun met ses connaissances à la disposition des autres et les membres de la collectivité se donnent mutuellement des cours. L’un d’eux, doué pour la peinture, a pu faire des portraits de ces épouses exilées volontaires. Ce sont elles qui, autorisées à entretenir une correspondance, donnaient des nouvelles à leurs familles.

Irène FRAIN a fait corps avec ces personnages. En allant sur place : Irkoutsk, Tchita en Sibérie, elle a pu constater que cette aventure avait laissé des traces profondes. Sept femmes l’ont aidée dans ses recherches là-bas tout en s’inquiétant de l’éventuelle disparition de l’esprit des Lumières dans la France d’aujourd’hui. Les autorités russes se sont exclamées : « Alors, vous êtes venue nous voir ». Autant dire que, sans avoir vécu cette déportation, Irène FRAIN n’en est pas pour autant sortie indemne. Nombreuses sont les questions que l’écriture de cet ouvrage a fait naître chez son auteur : qu’est-ce que l’amour ? Qu’est-ce que le bonheur dans ces circonstances extrêmes ? Et aussi pourquoi écrire ? Elle a eu la générosité de partager avec l’auditoire quelques unes de ses réponses : « Il faut être gaie, parce que c’est la politesse que d’être gaie. Ecrire, c’est résister, résister à la violence, à la cruauté, c’est aussi dire la beauté que l’on perçoit. J’aime les gens qui « continuent », qui disent non.  Pour moi, c’est la vie ».

La Présidente Monique RONZEAU remercie chaleureusement Irène FRAIN d’avoir partagé son aventure en Sibérie avec les membres de l’Association dont les applaudissements ont illustré l’intérêt qu’elles y ont pris.