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Le mardi 12 novembre 2019, Femmes Débat Société accueillait Caroline ROUX lors de son déjeuner mensuel.

Au préalable, la Présidente de l’Association, Monique RONZEAU rappelle brièvement le programme des rencontres à venir : un déjeuner le mardi 10 décembre avec Jean-Pierre RAFFARIN à l’occasion de la sortie de son livre : « Chine- le Grand Paradoxe ». En janvier, un dîner au Cercle Universitaire Mabillon permettra aux membres de l’Association de se retrouver pour un temps d’échanges.

Monique RONZEAU accueille ensuite Caroline ROUX et la remercie de sa présence. Elle lui présente en quelques mots l’Association qui rassemble des femmes de tous horizons autour de projets concrets et de partenariats tel celui avec les femmes tunisiennes intégrées dans l’Association Tunisiennes Fières. Femmes Débat Société a pour objectifs de développer un regard féminin sur les grands sujets de société ainsi que la participation des femmes dans le domaine politique et leur promotion au sein des entreprises et de l’administration.

Françoise VILAIN, Présidente d’Honneur de l’Association, souhaite la bienvenue à l’invitée avant de rappeler quelques étapes de son cursus : un diplôme de Sciences Po Lyon puis d’une école de journalisme avant de mener une carrière de journalisme radiophonique à Europe 1, ensuite télévisuel qui lui apporte aujourd’hui la célébrité avec l’animation de C dans l’air.

Outre le rappel de ces performances, Françoise VILAIIN insiste sur la personnalité de Caroline ROUX. C’est une femme complète qui a quatre enfants tout en étant une grande professionnelle. Elle a un charme sobre qui lui permet de faire ressortir ce que ses interlocuteurs ont de meilleur. Incisive, elle traite ses sujets avec profondeur et originalité.

Elle éclaircit ce qui est compliqué et, par ailleurs, veille à rendre effectif le principe de parité sur ses plateaux en y invitant systématiquement des femmes parmi les personnalités sollicitées.

Caroline ROUX prend à son tour la parole en évoquant tout d’abord son organisation personnelle et son rythme quotidien, rythme soutenu de façon rigoureuse puisqu’il débute à 5heures du matin avant de rejoindre France 2 pour l’émission de 7 h 28 et de préparer celle de C dans l’air en choisissant avec deux rédacteurs en chef le sujet du jour et avec six programmatrices les expert(e)s qui interviendront. La journée est ponctuée par de l’exercice physique, une brève sieste et une séance de maquillage avant d’animer l’émission. Rendue à sa vie privée à 19h, elle veille à réserver trois jours de suite à sa vie familiale à partir du jeudi soir.

Dans le monde des médias, les exigences sont particulièrement fortes envers les femmes car le code de crédibilité est d’abord masculin. Caroline ROUX a tenu à le féminiser au risque de susciter l’opposition de certains de ses collaborateurs ou collaboratrices. C’est ainsi, par exemple, qu’elle a sollicité une femme spécialiste du terrorisme. Il lui a fallu affronter, outre la résistance des collaborateurs, les réticences des expertes qui, au départ, hésitent à sortir de leur spécialité. Caroline ROUX a dû les encourager et elle continue à veiller à ce que les autres invités ne leur coupent pas la parole. Le combat est en train d’être gagné avec aujourd’hui une proportion de 40,8% de femmes à l’antenne.

Ce combat, elle l’a personnellement vécu lorsqu’elle est arrivée à 26 ans chez Europe 1 Elle a réussi à intégrer le service politique avec Alba Ventura. Au départ, elle s’est imposée sur un mode brutal, raide, au besoin désagréable et agressif, avant d’atténuer son comportement lorsqu’elle était à Canal + tout en restant intransigeante sur le fond. Elle est parvenue à gagner sa crédibilité en restant femme sans chercher à copier un modèle masculin. Ce fut au prix d’un petit combat quotidien. C’est ainsi qu’en annonçant un jour sa prochaine maternité à son patron, elle s’est attirée cette remarque : « Alors, vous ne serez plus journaliste ».

Interrogée sur les valeurs qu’elle privilégie, elle répond que comptent essentiellement pour elle sa famille, le bonheur dans le cocon familial. Mais cette option ne va pas sans un certain sentiment de solitude au plan professionnel qu’elle compte surmonter en favorisant l’émergence des femmes.

Lors des questions avec la salle, Caroline ROUX constate que l’information en continu ne favorise guère la réflexion. La course à l’audience encourage la violence des débats, la lutte voire l’insulte. Il faut « parler gras », caricaturer les opposants pour que les journalistes puissent en parler. Face à de telles situations, Caroline ROUX enjoint à ses invités de « parler un ton en-dessous » : elle est convaincue qu’on peut avoir une parole vraie, apaisée si l’on connaît bien ses dossiers et si l’on garde le cap. Il reste que les politiques arrivent souvent avec des idées préconçues et refusent d’en changer ou d’aborder d’autres sujets que ceux qu’ils défendent.

Elle choisit les sujets qu’elle aborde en fonction de leur problématique. Elle écarte ce qui divise et privilégie ceux sur lesquels on a de quoi parler. En ce qui concerne les intervenants, elle sélectionne ceux qui sont complémentaires et qui s’écoutent mutuellement. C’est ce qui valorise la parole.

A ses yeux, le journalisme est malheureusement un secteur quelque peu sinistré et qui n’est pas porteur d’avenir. Interrogée sur ses convictions, elle fait part de ses inquiétudes en constatant la fin du multilatéralisme. On est en train de détricoter ce qui a fait consensus après la guerre. Il n’y a qu’à regarder la brutalité qui bouillonne sous les réactions turques, chinoises et dans les pays

émergents ou face au problème kurde. Les peuples se soulèvent avec violence face à des institutions fragiles. De cette fragilité témoignent le projet britannique de changement de constitution, la dette des USA qui atteint 2 300 milliards de dollars, l’endettement des particuliers et des entreprises, le système financier avec les fonds de pension, l’économie souterraine …. Quand la richesse ne crée pas de valeur, s’esquisse la fracture du système capitaliste avec son cortège de risques : repli identitaire, retour des nationalismes.

La Présidente Monique RONZEAU remercie chaleureusement Caroline ROUX dont l’entretien se termine sous des applaudissements nourris.